Photo: Illustration: Mathieu Larone | Photo: Kelly Jacob
Son père est mort. Assassiné. Le fils dévasté cherche par tous les moyens à venger le patriarche ; à ses yeux, les suspects sont si nombreux… Obnubilé par le spectre de son père, le fils accuse donc la terre entière : sa mère qui s’est remariée bien rapidement, son beau-père qui a repris le trône de la famille, sa fiancée qui semble cacher quelque chose. Heureusement, l’ami fidèle le croit, le soutient, ne le lâche pas. L’enquête des deux inséparables commence : qui a tué le père ? L’histoire pourrait ressembler à celle d’Hamlet. Ça ne l’est pas exactement. Mais un peu quand même…
Dans sa passionnante Enquête sur Hamlet, Pierre Bayard réfléchit à l’une des plus vieilles énigmes criminelles de la littérature : qui a tué le père d’Hamlet ? Tout porte à croire qu’il s’agit de Claudius, le frère du père d’Hamlet. Car l’oncle finit par avouer son crime. Mais Bayard met en doute cette lecture. Il s’inspire, entre autres, d’une nouvelle de l’écrivain japonais Naoya Shiga, « En marge d’Hamlet. Journal de Claudius », dans laquelle l’auteur décrit le point de vue de l’oncle d’Hamlet, qui tient un journal intime. Claudius, dans cette version, est sensible et sympathique, sincèrement préoccupé par l’évolution psychologique de son neveu, chez qui il repère des troubles d’identité. Comment se fait-il que Hamlet ait un comportement si erratique ? Pourquoi est-il le seul à voir le spectre de son père ? La vengeance et l’oubli s’inspire de cette matière riche et inépuisable pour explorer la relation complexe entre un père et son fils, en s’attaquant à la dimension symbolique du meurtre du père.
Huit ans après la création de son Five Kings – l’Histoire de notre chute, une réécriture du cycle des rois shakespeariens, Olivier Kemeid s’aventure à nouveau dans la forêt du barde de Stratford. S’inspirant très librement de Hamlet, continuant à creuser son sillon dans les terres labourées des relations père-fils, il se nourrit de différentes interprétations de ce qui est devenu un mythe fondateur du théâtre, pour en livrer sa propre version, celle d’un jeune homme déchiré entre son désir de vengeance et la possibilité de l’oubli – le seul, parfois, qui permet la sérénité.